Caro et Jeunet émerveillent la Halle Saint Pierre
Parcourir l’exposition « Caro-Jeunet » à la Halle Saint Pierre, c’est comme voyager au cœur de l’imaginaire, singulièrement fantaisiste, de deux artistes motivés par l’enchantement, la curiosité et les plus grands mystères de la vie. L’assemblage fantastique et fantasmagorique des collections de Jean-Pierre Jeunet et Marc Caro autour de leurs œuvres plastiques et cinématographiques permet d’appréhender la cohérence qui unit leurs travaux, au sein d’un univers à part entière, qui se démarque de toute forme d’influence, de temporalité ou d’origine culturelle et géographique.
Sur la planète Caro-Jeunet, un regard d’enfant se pose sur un monde d’adulte. Une interprétation abstraite façonne et reproduit sur grand écran, une réalité concrète. La simplicité devient une religion, la guerre devient un tableau pictural, la monstruosité devient l’expression de notre humanité et l’imagination, une lentille convergente faisant de chaque détail de notre monde, même les plus sombres, une source d’amusement et surtout, d’émerveillement.
A travers de nombreux dessins, story-boards, accessoires, costumes, maquettes et autres constructions méticuleusement confectionnées dans l’amour de l’art et du détail, Jeunet et Caro nous invitent à pérégriner dans cet espace hors du temps, nous transportant chaleureusement vers ce qui s’avère être une démonstration de force. Leur talent, leur minutie et leur vision magnanime, pluraliste et nuancé d’un monde qui vit en perpétuel équilibre entre beauté et laideur, bravoure et peur, nature et synthétique, destruction et construction.
Nous découvrirons avec joie les objets emblématiques amassés et chéris par la douce Amélie, au son mélancolique des partitions inoubliables de Yann Tiersen – la richesse artistique et le soin porté aux créatures d’Alien : la Résurrection, honorant et transcendant le travail bio-mécanique de H. R Giger – l’ambiance soigneusement reproduite de la France de la Grande Guerre, sa beauté et ses horreurs, dans « Un long dimanche de fiançailles » - ou encore l’univers excentrique et steampunk de l’étrange « Cité des enfants perdu ».
« Dans tous les films que nous avons faits ensemble ou séparément, Marc Caro et moi-même, les objets ont toujours eu une place prépondérante. Marionnettes articulées pour les films d’animation, Machines Steampunk, costumes baroques, Aliens géants, objets emblématiques comme le cahier de photomaton d’Amélie, sans compter les storyboards, dessins de décors, BD et illustrations de Marc Caro... Tant d’objets qui traînaient dans mon bureau que je décidai de les partager. Le choix de la Halle Saint Pierre a été comme une évidence. Musée d’un art populaire non prétentieux... Situé à quelques mètres de là où Nino Quin- campoix pourchassait Amélie dans les jardins du Sacré Cœur... C’est à la Halle Saint Pierre que j’ai découvert Jephan de Villiers, Ronan-Jim Sévellec, Charles Matton, Gilbert Peyre, que j’ai admi- ré les œuvres de Giger, guide spirituel de mon « Alien »... artistes que je collectionne, et qui font le pont entre l’art « singulier » et nos films, qui ne sont pas moins, du moins je l’espère... singuliers. »
Jean Pierre Jeunet
Dans ce petit cabinet des curiosités, composant un précieux labyrinthe d’audace et de générosité, nous aurons le plaisir d’explorer aussi le travail d’animation de nos deux comparses, leur travaux en solo et pour notre plus grandes joies, les projets inaboutis pour lesquels Caro et Jeunet auront cependant offert de leur énergie et de leur inépuisable créativité.
Visuels, peintures, sculptures et fabrications artisanales fantasques, accompagnent ce parcours dans le temps et la filmographie de deux artistes inspirés et astucieux. Une route parsemée de nombreux extraits de films, comme autant de rappels qui encouragent grandement à se replonger dans un univers filmique drastiquement différent des standing et codes généralistes dans lesquels le cinéma s’uniformise. Une pépite gracieuse, à chérir et découvrir au plus vite.
« Si singulier il y a, il me semble que l’association bicéphale que nous avons constitué avec Jean-Pierre Jeunet fut l’une des choses les plus singulière du paysage cinématographique fran- çais. Deux cinéastes visuels qui renouent avec les origines du Cinématographe... Pour ma part, notre filiation revendiquée avec Meliès et l’art forain, trouve naturellement sa place à la Halle Saint Pierre qui a toujours sut accueillir ceux qui marchent en dehors des clous... »
Marc Caro
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